Nimue Création Pas à Pas

Il y a quelques mois de cela j’ai eu envie d’écrire sur le processus de création soit de manière générale soit les particularités liées à un sujet précis en cours. Et comme ces articles sont plébiscités par beaucoup d’entre-vous, je continue…

Dans cette partie du site vous trouverez donc des articles qui racontent comment une création s’élabore pas à pas, mêlant questions techniques, économiques et poétiques.
Et surtout n’hésitez pas à laisser vos commentaires à la fin de l’article. Bonne Lecture !

Terrain – épisode 2

Je suis une personne de terrain... Créer un paysage

Depuis le premier épisode je me suis lancée dans une nouvelle aventure de manière concrète à savoir : Créer un Paysage.

Tout ce qui nous entoure nourrit notre âme de brodeuse et transparaît sur la toile.

Première Partie : les Indispensables

1- Home sweet Home

Beaucoup de personnes ressentent le besoin de se créer un intérieur à leur image, un lieu, un nid, un endroit intime où se ressourcer. Tandis que d’autres peuvent vivre n’importe où dans n’importe quel décor.

Peut-être que nous, brodeuses, nous avons besoin de vivre accompagnées de nos ouvrages dans notre environnement pour nous sentir bien. Peut-être que l’on a besoin de les accrocher au mur (ou pas) pour que d’un coup d’œil quelque chose s’apaise en nous. D’un regard porté sur l’ouvrage en cours ou sur le tableau fini, et hop ! La paix. Espace privé, indésirables restez dehors, ici c’est Mon Havre.

D’autre trouveront la sérénité dans un espace vide, ou simplement épuré, sans accroche pour le regard.

Autant dire que je suis à l’opposé de cette dernière version : j’ai besoin de tout remplir, d’ailleurs cela se voit dans mes broderies et si vous les aimez il y a de fortes chances que ce soit aussi votre cas.

2- Un décor bien personnel

Dans mon espace intime, les livres ont une place de choix. De multiples bibliothèques couvrent les murs de la maison. Autant dire que les grands espaces ouverts ce n’est pas pour moi car j’ai absolument besoin de murs pour les livres. C’est mon décor principal. S’ils ne sont pas là : j’angoisse.

Quant aux couleurs, le rouge et le vert se marient effrontément adoucis par de l’ivoire et du caramel. Miam.

L’esprit brocante mêlé de choses plus modernes et fonctionnelles règne pour l’essentiel. Vous commencez à vous faire un dessin.

Je pourrais m’arrêter là mais non.

3- Ouverture

Il me faut aussi une ou des perspectives. C’est-à-dire des vues qui laissent le regard s’échapper.

Dans mon bureau, là où je brode, j’ai deux fenêtres. L’une s’ouvre vers la forêt de chênes et l’autre vers un champ. Comme je suis à l’étage je suis dans les frondaisons et cela me nourrit profondément.

Je sais depuis toute petite que j’ai besoin de grands arbres, de vieilles pierres et de mousse. Je me suis donc retrouvée souvent tout à fait inconsciemment dans des lieux qui ressemblent à ça. C’est amusant de constater avec le recul comme la vie nous guide vers le décor qui nous va.

Comme à 25 ans lorsque je me suis retrouvée dans un château au cœur d’une forêt.
Mais aussi la maison où je vis qui n’était qu’une maison « par défaut », mais tout de même en pierre avec de la mousse et des arbres. Il y a 18 ans lorsque je m’y suis installée, elle ne devait être que temporaire : 2 ans, 3 ans maximum… Et voilà que maintenant c’est chez moi pour la vie.

Il y a presque tout, mais pas tout.

Elle a « du potentiel ».

Friche dans la maison, friche dans le jardin.

4- Inspiration

Mon goût pour la littérature m’a souvent emmenée vers les romans et les fictions à l’anglaises, ce qui induit un appétit certains pour leurs paysages et leurs jardins. On y voit des dames en costume déambulants dans les sentiers délicatement ombragés des vergers, ou dans les jardins de vivaces et de rosiers bordés de hauts murs de briques, dans les allées sinueuses ourlées de fleurs aux couleurs multiples, des plans d’eau, des maisonnettes d’été, des beaux arbres plantés là dans de vastes étendues vertes de gazon bien coupé. Mais aussi les chapelles entourées de tombes fantomatiques et bien sûr les « rolling hills » les collines et les vallons habillés de pâturages et de jolies barrières. Voilà le décor extérieur que j’affectionne.

Pas étonnant alors que le jardin qui se dessine dans ma tête ressemble à celui-là.

Ces images « idéales » ont été collectées dans Pinterest…

Je rentre, je sors, chaussures crottées ou pas, tel un chat.

5- Sans frontière

Mon idéal de maison est la maison où la frontière entre l’extérieur et l’intérieur s’abolit. Je rentre, je sors, chaussures crottées ou pas. Tel un chat qui entre par ici et ressort par là.

Bien que dedans, je veux me sentir dehors, et inversement. Dans mon jardin je veux des « chambres » de verdure, des allées qui tournent et retournent jusqu’à cet espace cosy où le vert dominant, se mêle, à quelques taches de couleurs fleuries. Ainsi va ma broderie extérieure… un assemblage de tons et de matières qui se paillette d’un feu d’artifice de petites beautés, fleurissant ici et là, comme des perles, offrant chaque jour de nouvelles surprises.

Tout ce qui nous entoure nourrit notre âme de brodeuse et transparaît sur la toile.

Il s’agit alors de créer les conditions de cette matière fertile.

Ainsi de brodeuse de fils je me retrouve brodeuse de chlorophylle.

Je recrée mon paysage intérieur à l’extérieur.

Dedans, dehors, dedans, dehors…

Il y a juste un tout petit écueil c’est que je n’ai jamais rien planté de ma vie et que le terrain est envahi de ronces et de tout un tas d’autres « mauvaises herbes ». Le chemin qui mène aux jolies allées de verdures n’est pas pour tout de suite.

C’est le moment de montrer si je suis vraiment une personne de terrain…

xxxx

Deuxième partie : Action

1-Point de départ : le champ

3- évacuer le foin 99 brouettées

2- fauchage, j’ai à peine 24 heures pour tout évacuer

4- Labour

1- il faut tout remettre à plat, c’est-à-dire :

faucher, labourer, débarrasser la terre des cailloux et des chardons, des ronces, des.., des, des, griffer, ratisser encore et encore, puis semer avant la pluie, avant l’hiver.

Un tracteur vient qui fauche et laboure la terre. À moi tout le reste des tâches. 10 jours à gratter, 10 jours à nettoyer et évacuer les indésirables. 2000 m2 environ qui se transforment d’un coup en un terrain de labour prêt à être ensemencé des graines du futur gazon. Dur mais plaisant. Bien que novice je me sens à ma place, appartenant à une longue lignée de paysans je me sens étonnamment à l’aise. Je connais les gestes, je les ai vus faire par mon père il y a bien des années.

5- Passage de la herse pour déloger le chiendent

6-Premier passage du râteau

7- Evacuation de quelques tonnes de pierres

8- Evacuation de quelques 200 brouettées de chiendent

9- Le terrain est bien ratissé, je sème à la volée

10- Terrain lunaire qui attend la pluie

Charys s’interroge : qu’est-ce qui se passe ici ?

Cid apprécie les pauses et moi aussi. Il fait 40 degrés en plein soleil !

Grosse toilette de fin de journée

10 jours de travail non-stop au champ et plus de 400 brouettées plus tard…

Maintenant que la pluie vienne !

Une heure après elle tombe… quel timing !

2-Patience

A peine les semences dispersées à la volée, la pluie tombe. Maintenant il faut attendre… peut-être le plus éprouvant finalement. L’hiver passe, une petite plaine s’étale devant moi, toute verte, mais remplie encore de chardons, de chiendent, de plantain. Je suis un peu triste car pour le joli gazon anglais on repassera !

Il y a aussi des légions de petits égyptiens qui ont bâti des pyramides, des centaines de pyramides : les vers de terre ont beaucoup travaillé ! Les vilains ont fait remonté à la surface la terre et le reste, et mon joli gazon est constellé de petits dômes.

Mon jardin devra s’adapter à la nature d’ici. Cela comprend un max d’adventices, pas toutes vilaines d’ailleurs, et des vers de terre qui certes aèrent la terre mais aussi la bossèlent. Que de choses à apprendre !

Le dur apprentissage du lâcher-prise est en marche…

1 – Pyramide

2- Mille pyramides

Plaine blanche de gelée

Inspection quotidienne des jeunes pousses. Ici les 2 inspecteurs en chef…

Ça verdit très vite, le printemps s’annonce !

Mars arrive. J’hésite encore à marcher sur cette étendue verte qui me semble encore fragile et pourtant il va falloir planter hardiment avant l’été !

Rendez-vous pour la suite : Terrain, Episode 3…

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Annaïck Chauvel

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